ROMAN POLANSKI EST LIBRE ET NE SERA PAS EXTRADE VERS LES ETATS-UNIS !

02/01/2020 01:14

La décision est tombée peu avant 14 heures : la justice suisse refuse d'extrader Roman Polanski et lève son assignation à résidence. Le cinéaste franco-polonais "ne sera pas extradé vers les Etats-Unis et les mesures de restriction de sa liberté sont levées", a annoncé lundi la ministre suisse de la Justice.

Roman Polanski avait fui les États-Unis en 1978, où il n'a plus jamais mis les pieds, alors qu'il était sur le point d'être condamné après avoir plaidé coupable de relation sexuelle avec une jeune fille, alors âgée de 13 ans.

Il avait au départ fait l'objet de six chefs d'inculpation, et notamment de viol, pour avoir eu une relation sexuelle avec elle après lui avoir fait consommer du champagne et de la drogue, lors d'une séance de photos au domicile hollywoodien de l'acteur Jack Nicholson, absent au moment des faits. Roman Polanski avait nié l'accusation de viol, mais plaidé coupable de relation sexuelle avec une mineure, ce qui est passible de 20 ans de prison. Le réalisateur soutenait que la jeune fille n'en était pas à sa première expérience sexuelle et qu'elle était consentante. Il a passé 42 jours en prison, où il a subi des examens psychiatriques, avant de s'enfuir du pays avant le procès.

Le 26 septembre 2009, il avait été arrêté sur mandat américain à son arrivée à Zurich où il devait recevoir une consécration lors d'un festival de cinéma. Le 3 décembre 2009, Roman Polanski avait pu rejoindre son chalet de Gstaad, en Suisse, après le dépôt d'une caution de 4,5 millions de francs suisses (3 millions d'euros). Il était depuis assigné à résidence dans ce chalet. Il est sorti de son silence à deux reprises, en décembre 2009 et en mai 2010, via le site internet de l'un de ses plus ardents défenseurs, son ami Bernard-Henri Lévy. Dans son courrier du 2 mai, Roman Polanski écrivait : "Cette affaire a été sortie de sa torpeur de trente ans par une cinéaste qui a voulu faire un documentaire et qui a recueilli les témoignages des personnes concernées à l'époque sans que je ne participe ni de près ni de loin à ce travail. Ce documentaire a mis en lumière le fait que j'avais quitté les Etats-Unis parce que je n'avais pas été traité équitablement ; et il a, aussi, déclenché la vindicte des autorités judiciaires de Los Angeles qui se sont senties attaquées et ont décidé de demander mon extradition à la Suisse où je me rends régulièrement depuis plus de trente ans, sans jamais avoir été inquiété."

L'oeil vigilant de Paris

Depuis le début, cette affaire est suivie de près par les autorités françaises. Le 15 mai dernier, le président Nicolas Sarkozy s'était enquis par téléphone du sort du cinéaste avec son homologue suisse, Doris Leuthard. Le chef de l'État avait abordé la question de son extradition. Le lendemain, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner avait exprimé, "à titre personnel" sa "peine" pour Roman Polanski, et espérant à titre purement individuel que la justice se prononce afin que le cinéaste franco-polonais soit "enfin soulagé de ce fardeau" et "pour qu'une fois pour toutes, Polanski soit tiré de cet effrayant engrenage où il risque de perdre sa santé morale voire plus". Le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, avait déclaré de son côté que son devoir était de "ne rien dire", mais que "le silence" de sa part "n'interdi[sait] pas les sentiments" de sympathie pour Polanski".

Né en 1933 à Paris de parents juifs polonais, Roman Polanski s'est fait connaître au cinéma en 1962 avec Le Couteau dans l'eau . Il a réalisé dans les années 1970 et 1980 de nombreux films marquants comme Rosemary's Baby , Chinatown ou Tess. Marié à l'actrice française Emmanuelle Seigner, avec qui il a eu deux enfants, Polanski a été récompensé d'un Oscar en 2002 pour Le Pianiste . Son ancienne épouse, Sharon Tate, alors enceinte, a été assassinée par les adeptes du gourou Charles Manson à Los Angeles en 1969.